Notre ascension du mont Whitney

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En route vers le mont Whitney

Depuis un moment déjà, nous avions planifié effectuer une tentative d’ascension du mont Whitney. À 4417m d’altitude, il s’agit du sommet le plus haut des États-Unis contigus, c’est-à-dire en excluant l’Alaska et Hawaï.

Pour pouvoir accéder au mont Whitney, il faut des permis qui sont assez difficiles à avoir. La majorité des gens obtiennent leur permis des mois à l’avance pour faire une ascension d’une durée de 2 à 4 jours. Pour nous, c’était impossible de planifier où nous allions être des mois à l’avance. Nous avons donc opté pour un permis d’une seule journée, car ceux-ci sont moins en demande.

Depuis plusieurs semaines déjà, Samuel suivait la disponibilité des permis ainsi que la progression de la fonte sur la montagne avec les rapports d’expéditions d’autres grimpeurs. Lors de la canicule historique que nous avons subie en Utah, nous avons réalisé que la majorité des grimpeurs mentionnaient des belles conditions, sauf pour une partie du sentier, mais que l’ascension était maintenant envisageable en une journée.

Nous avons donc décidé de nous prendre des permis à partir de l’Utah. Comme la saison débutait tout juste pour les ascensions estivales, nous avons réussi à avoir deux permis environ une semaine avant la journée de l’ascension. Nous avons donc profité de ce prétexte pour quitter la vague de chaleur du sud-ouest américain et nous réfugier quelques jours à environ 3000m d’altitude, à l’abris des températures de plus de 40 degrés Celcius que nous subissions chaque jour.

Planification de l’expédition

Si cette section vous intéresse moins, vous pouvez passer directement à l’expédition et aux photos ! Comme le mont Whitney est une montagne exigeante qui demande une planification particulièrement minutieuse, nous avons décidé de partager ce processus de préparation particulier en incluant nos recherches, nos réflexions et nos stratégies pour être prêts à toute éventualité !

L’ascension du mont Whitney est considérée comme une des randonnées non techniques d’une journée les plus difficiles aux États-Unis pour plusieurs raisons.

Tout d’abord, l’altitude pose un grand défi. À partir d’environ 2500 à 3000m d’altitude, l’air se raréfie et il est possible de souffrir de mal d’altitude. Or, le départ du sentier du mont Whitney débute autour de 2500m. Étant donné que nous avons passé les dernières semaines à nous entrainer en montagne, nos corps sont déjà acclimatés et nous sommes confiants de ne pas avoir trop de difficultés en bas de 4000m. Après cela, nous aurons environ 6km à faire entre 4000 et 4417m d’altitude. Nous devrons donc faire attention pour modérer notre effort physique et surtout, être aux aguets pour les symptômes liés au mal d’altitude. Parmi les symptômes classiques, il peut y avoir des maux de têtes, des étourdissements et de la nausée. À cette altitude, les complications sont peu probables. Il faudra seulement être attentifs aux symptômes et en cas de problèmes, faire demi-tour et redescendre. Les symptômes cessent alors rapidement. Le plus gros risque est de ne pas faire demi-tour et d’être pris près du sommet avec des symptômes incapacitants qui empêchent de redescendre.

Deuxièmement, le profil de la randonnée est excessivement imposant. Pour atteindre le sommet, il faut pouvoir effectuer une randonnée de 34km avec environ 2000m d’ascension et 2000m de descente en un temps raisonnable. Le moins de temps la tentative dure, le moins on s’expose aux risques liés au mal d’altitude et à la météo. En effet, avec son altitude et son exposition, le mont Whitney a tendance à avoir une météo changeante et difficile. Fait intéressant : en raison de conditions géographiques, durant la saison des moissons à la fin de l’été, le mont Whitney reçoit des orages pratiquement à chaque jour en début d’après-midi. Ces orages sont excessivement violents et se forment rapidement, très souvent en milieu d’après-midi. Les gens qui s’y risquent durant la période de la moisson doivent donc atteindre le sommet à tout prix en avant-midi. Beaucoup ont été témoins d’air tellement chargé en électricité statique que leurs cheveux se dressaient sur leur tête. D’autres peuvent entendre des crépitements de décharges électriques dans l’air ! C’est un exemple impressionnant des forces de la nature. Heureusement pour nous, nous sommes très loin de cette saison et ce genre de tempête ne se produit pas ! Nous prévoyons cependant atteindre le sommet en matinée, comme c’est souvent le moment de la journée que la météo en montagne est la plus clémente. Évidemment, nous allons confirmer que les prévisions météo sont bonnes pour le jour de l’ascension, et nous surveillerons la météo de près lorsque nous serons sur la montagne.

Pour finir, le défi que nous suivons de près depuis longtemps est la présence de neige dans une portion critique de l’ascension. Entre environ 3600 et 4150m d’altitude, le sentier serpente dans une portion à flanc de falaise, effectuant ainsi près d’une centaine de lacets ! Or, beaucoup de rapports mentionnent que cette portion n’est pas praticable en raison de neige et de glace et qu’on s’expose à des risques de chute et de glissade. Cependant, d’autres prennent le risque de s’y engager. Pour nous, cela semble un peu un coup de dés : si ce segment est sécuritaire avec des crampons et des piolets, tant mieux, mais sinon notre expédition tombe à l’eau.

Une autre option s’offre cependant à nous : pour éviter ce segment, une route hivernale traverse un champ de neige à forte pente. À cette période-ci de l’année il y a encore de la neige à cet endroit. Cependant, dès que le soleil se lève, la neige devient molle et les champs de neige sont très difficiles à grimper. Ils restent sécuritaires si on est bien préparé ! En progressant avec nos piolets et nos crampons, nous pouvons nous arrêter en cas de chute, contrairement aux lacets qui sont situés le long d’une falaise. Nous avons donc décidé de tenter d’atteindre ce champ de neige avant le lever du soleil, pour pouvoir le grimper avec les crampons lorsque la neige sera encore dure. Si nous arrivons trop tard, nous pouvons tout de même tenter de grimper, mais cela demandera un effort physique considérablement plus intense. Pour arriver à temps, nous estimons devoir débuter l’ascension à partir du stationnement autour de 1h30 am. Cela peut paraître intense, mais la majorité des ascension d’une journée débute entre 1h et 4h am ! Lors de la descente, nous profiterons de la neige molle pour glisser le long de la pente en nous contrôlant avec nos piolets.

Ainsi, la veille du jour J, nous nous sommes couchés le plus tôt possible et c’est avec une très courte nuit de sommeil que nous avons débuté notre tentative pour conquérir l’imposant mont Whitney.

Mount Whitney Portal

(2540m d’altitude, 1h30)

Lorsque notre cadran a sonné, nous avions tous les deux l’impression de ne pas vraiment avoir dormi. Cependant, nous étions prêts et nous avions hâte de partir. Nous avons rapidement enfilé notre équipement qui était déjà prêt en mangeant le plus possible avant le départ. À 2h, nous étions partis ! Au départ du sentier, nous avons croisé un autre duo qui s’apprêtait également à partir. L’air était frais, nous nous sommes donc rapidement activés pour nous réchauffer. La première portion du sentier n’est pas technique et serpente dans la vallée au dessus du stationnement. Nous avons donc traversés les premiers kilomètres rapidement sans difficulté et sans ressentir l’effet de l’altitude.

Outpost Camp

(3160m d’altitude, 3h38)

Nous avons mis un peu plus d’une heure et demi pour atteindre le premier camp de base de la montagne. Peu de grimpeurs dorment ici, il s’agit généralement d’un campement utilisé pour s’acclimater à l’altitude pour ceux qui éprouvent des difficultés. Nous avons croisé un groupe qui cherchait le sentier et leur avons indiqué où le sentier continuait. À partir de Outpost Camp, le sentier devient plus sauvage. Dans la noirceur totale, nous n’hésitons pas à utiliser des cartes sur nos téléphones cellulaires pour naviguer lorsque le sentier est difficile à suivre. Il y a peu d’arbres et il est parfois difficile de suivre le sentier dans la noirceur, nous ne voulons pas perdre de temps et d’énergie si tôt dans l’aventure. En route vers le second campement, les pentes sont également plus abruptes et l’altitude commence à nous ralentir légèrement. Le souffle commence à être court ! Sur ce segment, nous avons croisé une belle chute et avons pu remplir nos bouteilles d’eau. Des plaques de neige commencent à apparaître sur les versants de la montagne, visibles au loin avec la première lumière diffuse de la journée.

Trail Camp

(3661m d’altitude, 4h55)

En arrivant au camp principal sur la montagne, nous avons rencontré plusieurs autres randonneurs, sortis de leur tente pour observer le lever de soleil imminent. Le campement, situé en bordure d’un petit lac, offre une vue impressionnante sur le mont Whitney. Il s’agit de la première vue claire du sommet que nous avions. Comme le soleil se levait d’une minute à l’autre, nous avons continué de progresser pour atteindre le champ de neige le plus tôt possible. Quelques minutes plus tard, nous étions au pied de la pente intimidante. Nous avons mis nos petits crampons, sorti nos piolets et avons commencé à progresser sur la portion du bas, moins pentue que celle du haut. Comme nous étions encore très tôt, la neige était solide sous nos pieds et nos crampons y collaient comme des velcros. Nous progressions rapidement, tout en profitant du lever du soleil derrière nous.

Une fois arrivé à la portion abrupte du champ de neige, nous avons réalisé que la fonte des derniers jours donnait une texture très rugueuse à la neige. Cela faisait presque des marches sur lesquels nous pouvions grimper très facilement malgré la forte pente. Nous avons donc continué notre ascension, ralentis seulement pas nos limites physiques et l’altitude. En très peu de temps, nous étions au sommet du champ de neige, très contents des résultats de notre planification minutieuse. Durant l’ascension, nous avons vu des grimpeurs dans les lacets que nous avons décidé d’éviter. Ils semblaient avoir beaucoup de difficulté. Nous étions contents d’avoir choisi cette alternative !

Nous avons finalement atteint la crête du mont Whitney, bien essoufflés, mais décidés à terminer l’ascension. Il était encore très tôt, nous étions fatigués mais encore assez en forme pour finir l’ascension.

L’arrière des Needles

(4165m d’altitude, 6h05)

À partir de Trail Camp, le mont Whitney possède une façade intimidante, complètement verticale. Pour atteindre le sommet, le sentier monte sur la crête du mont Whitney à environ 3km du sommet, puis serpente sur l’autre versant de la montagne jusqu’au sommet. L’autre versant du mont Whitney est complètement différent. Il s’agit de débris rocheux gigantesques, empilés dans une pente beaucoup plus facilement praticable. Nous avons donc progressé sur la crête du mont Whitney, derrière d’autre sommets magnifiques surnommés The Needles, les aiguilles. Même si cette portion est beaucoup moins pentue, l’altitude nous a donné un peu de misère. Nous avions le souffle court et nous progressions lentement. Cependant, les paysages uniques nous ont donné l’énergie nécessaire pour continuer.

À l’est, nous pouvions voir tout le chemin parcouru. À l’ouest, des paysages lunaires intimidants. Cette portion du sentier a été de loin notre préférée. Nous pouvions également voir au loin les prochains parcs que nous allions explorer, Sequoia et Kings Canyon National Park. Pour s’y rendre, même si nous pouvions les voir, nous devrons faire plus de 4h de route pour contourner ce secteur si sauvage de la Sierra Nevada.

Sommet du mont Whitney

(4417m d’altitude, 7h25)

Après 3 longs kilomètres sur les aiguilles, nous avons finalement atteint le sommet du mont Whitney ! Il y avait déjà beaucoup de randonneurs au sommet. Certains traversaient la Pacific Crest Trail (PCT), un sentier qui parcourt les États-Unis au complet du sud au nord. Cependant, la majorité des randonneurs arrivaient de Trail Camp, le camp situé à la base du mont Whitney.

Après avoir pris une bonne collation et un peu de repos bien accueilli, nous avons recommencé la descente. Même après plus d’une quinzaine de kilomètres, nous savions que nous n’étions qu’à mi-chemin et que le retour ne serait pas de tout repos.

Descente vers Trail Camp

Les 3km pour relier le sommet du mont Whitney au sommet du champ de neige n’auront pas été aussi faciles qu’espéré ! En effet, avec notre niveau de fatigue et l’effet de l’altitude, nous avancions lentement avec beaucoup d’efforts. Une fois arrivé au sommet du champ de neige, nous avons évalué la texture de la neige. Elle fondait déjà rapidement, la rendant glissante et molle. La descente semblait intimidante, nous avons hésité à nous y engager. Après avoir discuté, nous avons décidé de faire quelques tests dans le haut de la pente, puis nous avons décidé de nous engager. C’est en contrôlant notre vitesse avec nos piolets que nous avons glissé sur plusieurs centaines de mètres. Même si la pente était très glissante, nous avons eu beaucoup de plaisir à descendre. Nous descendions à tour de rôle, nous arrêtant régulièrement pour attendre l’autre et vérifier qu’il n’y avait pas d’obstacles dangereux sous nous.

Une fois au pied de la pente, nous avons croisé beaucoup de randonneurs qui nous demandaient l’état de la pente pour l’ascension. Cependant à cette heure-ci, escalader le champ de neige était difficilement envisageable. C’était devenu trop glissante pour monter. Nous avions bien fait de partir très tôt !

Retour au stationnement

Après Trail Camp, c’était le début de l’épreuve d’endurance ! Même si le sentier descendait, il nous restait beaucoup de distance à parcourir pour atteindre notre véhicule. C’est donc avec les jambes lourdes et beaucoup de fatigue que nous avons terminé la randonnée. Sur le chemin du retour, nous avons eu la chance d’observer beaucoup de choses que nous avions manqué lors de la portion nocturne de notre ascension. Nous avons découvert des vallées magnifiques ainsi que plusieurs lacs et des chutes impressionnantes !

Après 10h d’effort intense, nous avons atteint le départ du sentier. Depuis le début du voyage, cette aventure aura été la plus exigeante physiquement. Nous étions tous les deux morts de fatigue. C’est avec les jambes lourdes, complètement exténués, mais très fiers de nous que nous avons mis fin à cette expédition. Nous avons fêté l’occasion avec… une bonne grosse sieste dans la van !

Pour les prochaines semaines, nous souhaitons prendre le temps de bien récupérer. Ensuite, nous irons explorer le restant de la Sierra Nevada, entre autres les parcs nationaux de Sequoia et Yosemite.

Response to “Notre ascension du mont Whitney”

  1. Aline Millette Avatar
    Aline Millette

    Votre appétit pour les sommets ne cesse pas et vous êtes pas mal en forme et parlons des photos toujours aussi magnifiques 😘😘